Chaque début d’année apporte son lot d’ajustements dans le paysage réglementaire et fiscal, et 2025 ne fait pas exception. Crédits d’impôts, dispositifs de partage de la valeur, plafonds d’exonération de la CFE et bien d’autres mesures voient leurs contours redessinés. Afin de mieux vous éclairer sur ces modifications, nous vous proposons un tour d’horizon détaillé des principales nouveautés, réparties en deux catégories : les mesures pérennes et celles qualifiées d’applicables en suspens.
- 1. Les mesures applicables pérennes
- Qu’entend-on par « mesures pérennes » ?
- Facilitation administrative : Fin de la procédure de continuité du guichet unique
- Renforcement du dispositif judiciaire pour les entreprises en difficulté
- Mise en place obligatoire d’un dispositif de partage de la valeur
- Nouvelles modalités d’aide à l’embauche d’un apprenti
- Évolution des taxes sur l’affectation des véhicules à des fins économiques
- Révision des taux du versement mobilité
- Nouvelles règles pour le régime de franchise en base de TVA
- Revalorisation des plafonds d’exonération de CFE dans les zones urbaines en difficulté
- 2. Les mesures applicables en suspens
- Qu’entend-on par « mesures applicables en suspens » ?
- Fin du dispositif d’exonération d’impôt en zones franches urbaines – Territoires Entrepreneurs (ZFU-TE)
- Fin du dispositif d’exonération fiscale pour les entreprises implantées dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV)
- Fin du dispositif d’exonération d’impôt pour les entreprises implantées dans des bassins d’emploi à redynamiser (BER)
- Perspectives gouvernementales pour les zones bénéficiant d’encouragements fiscaux
- Ressources humaines : Retour au taux légal d’exonération des frais de transport
- Aides publiques et financements : Fin de certains crédits d’impôt
1. Les mesures applicables pérennes
Pour mieux, comprendre, essayons de définir les termes.
Qu’entend-on par « mesures pérennes » ?
Les mesures pérennes désignent l’ensemble des règles, lois ou décisions qui sont destinées à s’inscrire durablement dans le temps. Concrètement, cela signifie que même en cas de non-adoption de la loi de finances 2025, ces dispositions resteront effectives sur le long terme. Elles s’appuient sur des textes législatifs ou réglementaires déjà votés, garantissant ainsi leur application automatique dès le 1ᵉʳ janvier 2025.
Facilitation administrative : Fin de la procédure de continuité du guichet unique
Dans le but de simplifier et de centraliser les démarches administratives des entreprises, l’État a inauguré en janvier 2023 un guichet unique dédié aux formalités entrepreneuriales, géré par l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI). Ce dispositif, conçu pour fluidifier les procédures et réduire la complexité administrative, s’est rapidement imposé comme une solution efficace. Jusqu’à présent, une alternative assurée via Infogreffe garantissait la continuité du service pendant la phase de transition. Toutefois, avec la pleine opérationnalité du guichet unique, la procédure de continuité via Infogreffe sera définitivement interrompue le 31 décembre 2024, marquant ainsi une nouvelle ère dans la gestion des formalités d’entreprises.
Renforcement du dispositif judiciaire pour les entreprises en difficulté
Afin de mieux répondre aux enjeux spécifiques des entreprises confrontées à des difficultés économiques, un arrêté ministériel en date du 5 juillet 2024 a procédé à la transformation de 12 tribunaux de commerce en tribunaux des activités économiques. Cette réforme, qui prendra effet le 1ᵉʳ janvier 2025, vise à doter la justice d’une expertise plus pointue et adaptée aux problématiques économiques, permettant ainsi une résolution plus rapide et pertinente des litiges dans le secteur des affaires.
Mise en place obligatoire d’un dispositif de partage de la valeur
Dans le cadre d’une volonté de promouvoir une redistribution équitable des bénéfices au sein des entreprises, la loi du 29 novembre 2023 instaure une expérimentation obligatoire, d’une durée de cinq ans, visant à mettre en œuvre un dispositif de partage de la valeur dans certaines entreprises. Cette obligation s’appliquera aux sociétés qui remplissent les trois critères suivants :
- Effectif : Entre 11 et 49 salariés.
- Forme juridique : L’activité doit être exercée sous forme de société.
- Performance économique : Un bénéfice net fiscal représentant au moins 1 % des recettes, sur trois années consécutives.
Dans ces entreprises, le partage de la valeur pourra prendre plusieurs formes, telles que :
- La signature d’un accord de participation ou d’intéressement,
- L’abondement à un plan d’épargne salariale (qu’il s’agisse d’un PEE, PEI, PÈRE-CO, PERE-CO-I, PERCO ou PERCO-I),
- Ou encore le versement d’une prime dédiée au partage de la valeur.
Il est important de souligner que cette mesure s’appliquera dès les exercices ouverts à partir du 1ᵉʳ janvier 2025, les performances des exercices 2022, 2023 et 2024 servant à vérifier la condition relative au bénéfice net fiscal.
Nouvelles modalités d’aide à l’embauche d’un apprenti
L’aide exceptionnelle visant à encourager l’apprentissage se verra reconduite dès janvier 2025. Un décret, qui sera publié au cours du mois de janvier 2025, viendra préciser les modalités de cette aide, qui varient selon le profil de l’apprenti recruté et la taille de l’entreprise. Les grandes lignes de ce dispositif prévoient notamment :
- 6 000 € maximum pour le recrutement d’apprentis en situation de handicap,
- 5 000 € maximum pour les entreprises de moins de 250 salariés,
- 2 000 € maximum pour celles employant 250 salariés ou plus.
De plus, dans l’attente du décret, le ministère du Travail indique qu’une aide pouvant atteindre 6 000 € sera accordée pour la première année d’exécution du contrat d’apprentissage destiné à préparer un titre ou diplôme allant jusqu’au niveau baccalauréat (ou bac+2 pour les Outre-mer), cette disposition s’appliquant exclusivement aux entreprises de moins de 250 salariés.
Évolution des taxes sur l’affectation des véhicules à des fins économiques
À partir du 1ᵉʳ janvier 2025, la fiscalité applicable aux véhicules utilisés à des fins économiques – anciennement désignée sous le nom de taxe sur les véhicules de société (TVS) – fera l’objet de plusieurs réformes notables :
- Révision des tarifs : Les tarifs de la taxe annuelle sur les émissions de CO₂ seront revus à la hausse et adaptés pour mieux refléter les enjeux environnementaux.
- Modification du régime d’exonération : Les véhicules hybrides, qui bénéficiaient auparavant d’exonérations, verront ce privilège supprimé, afin de garantir une cohérence fiscale.
- Redéfinition du champ d’application : La catégorie des véhicules concernés sera étendue, notamment pour inclure certains modèles de « camionnettes » classés en catégorie N1.
Ces ajustements s’inscrivent dans une démarche globale de renforcement de la fiscalité environnementale et de mise en adéquation des règles avec les avancées technologiques du secteur automobile.
Révision des taux du versement mobilité
Le dispositif du versement mobilité, qui fait l’objet d’une réévaluation semestrielle (les 1ᵉʳ janvier et 1er juillet de chaque année), connaîtra d’importantes modifications dès le 1ᵉʳ janvier 2025. Tant le champ d’application que les taux appliqués seront ajustés, afin de refléter l’évolution des politiques de mobilité et des conditions économiques actuelles.
Nouvelles règles pour le régime de franchise en base de TVA
Un décret nouvellement promulgué, qui entrera en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2025, redéfinit les modalités du régime de franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) en France. En alignant ces règles sur les directives européennes en vigueur, cette réforme vise à simplifier le cadre fiscal applicable aux petites entreprises tout en assurant une harmonisation avec le marché unique.
Revalorisation des plafonds d’exonération de CFE dans les zones urbaines en difficulté
Les entreprises implantées dans des zones urbaines en difficulté bénéficient actuellement d’exonérations temporaires concernant la cotisation foncière des entreprises (CFE). Pour l’année 2025, les plafonds de ces exonérations seront relevés, tenant compte notamment de la hausse des prix constatée par l’Insee. Cette réévaluation a pour objectif de mieux adapter le soutien fiscal aux réalités économiques locales et de compenser l’inflation dans ces territoires sensibles.
2. Les mesures applicables en suspens
Plusieurs mesures applicables sont encore en suspens et voici ce que l’on peut en dire.
Qu’entend-on par « mesures applicables en suspens » ?
Les mesures applicables en suspens regroupent l’ensemble des règles actuellement en vigueur, mais dont la pérennité n’est pas garantie à long terme. En d’autres termes, ces dispositions pourraient être modifiées ou même annulées si un nouveau budget pour 2025 venait à être adopté avec des orientations différentes. Pour en savoir plus sur l’évolution des mesures fiscales et les positions que le Gouvernement compte défendre dans le cadre de la loi de finances 2025, nous vous invitons à consulter notre article dédié.
Fin du dispositif d’exonération d’impôt en zones franches urbaines – Territoires Entrepreneurs (ZFU-TE)
Le dispositif d’exonération d’impôt en zones franches urbaines – Territoires Entrepreneurs (ZFU-TE), qui permettait aux entreprises implantées dans ces zones de bénéficier d’une exonération d’impôt sur les bénéfices pendant une période de cinq ans, sera supprimé à partir du 1ᵉʳ janvier 2025, en l’absence de loi de finances visant à le proroger. Il convient de noter que cette exonération restera néanmoins applicable pour les créations ou extensions d’entreprises intervenues jusqu’au 31 décembre 2024. Parallèlement, les plafonds d’exonération de la CFE pour les entreprises situées dans les zones urbaines en difficulté ont été augmentés de 3,6 % afin de compenser la hausse des prix relevée par l’Insee.
Fin du dispositif d’exonération fiscale pour les entreprises implantées dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV)
De manière analogue, le dispositif visant à alléger la fiscalité des entreprises s’implantant dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV) prendra fin le 1ᵉʳ janvier 2025, sauf en cas de nouvelle prorogation prévue dans la loi de finances. Là encore, les exonérations accordées pour les créations ou extensions d’entreprises jusqu’au 31 décembre 2024 demeureront en vigueur, et les plafonds de la CFE dans ces zones verront leur niveau ajusté à la hausse de 3,6 % en réponse aux évolutions économiques constatées.
Fin du dispositif d’exonération d’impôt pour les entreprises implantées dans des bassins d’emploi à redynamiser (BER)
Les Bassins d’Emploi à Redynamiser (BER) bénéficiaient d’un dispositif spécifique d’exonérations fiscales et sociales, destiné à encourager l’implantation des entreprises dans des territoires en difficulté économique. Toutefois, ce dispositif ne sera plus disponible à partir du 1ᵉʳ janvier 2025, en l’absence d’une mesure de prorogation intégrée dans la loi de finances. Les entreprises qui s’étaient installées sous ce régime devront donc se tourner vers de nouvelles mesures ou dispositifs de soutien qui pourraient être mis en place ultérieurement.
Perspectives gouvernementales pour les zones bénéficiant d’encouragements fiscaux
Conscient des enjeux territoriaux, le Gouvernement entend soutenir l’adoption, dans le cadre du futur projet de loi de finances pour 2025, de mesures spécifiques en faveur des entreprises s’implantant dans des zones stratégiques. Parmi ces initiatives figurent :
- Zonage France Revitalisation Rurale (FRR) : Octroi d’avantages pour les entreprises implantées à partir du 1ᵉʳ juillet 2024 dans des communes anciennement classées en Zone de Revitalisation Rurale (ZRR) et qui ne relèvent plus du classement FRR ;
- Reconduction des avantages fiscaux en ZFU et QPV : Maintien des incitations fiscales, telles qu’elles étaient applicables jusqu’au 31 décembre 2024, pour encourager l’installation d’entreprises dans ces zones sensibles ;
- Poursuite des avantages pour les BER : Extension des mesures d’aide pour les entreprises qui s’installeront dans les Bassins d’Emploi à Redynamiser, avec une reconduction des avantages prévue jusqu’en 2027.
Ces propositions visent à favoriser l’investissement et la dynamisation économique dans les territoires où le soutien fiscal a déjà prouvé son utilité.
Ressources humaines : Retour au taux légal d’exonération des frais de transport
Depuis août 2022, les entreprises bénéficiaient d’une exonération de cotisations sociales pouvant atteindre 75 % pour la prise en charge des frais de transport en commun des salariés. Cependant, en l’absence d’une adoption formelle du budget 2025, cette mesure exceptionnelle ne sera pas reconduite. Ainsi, dès le 1ᵉʳ janvier 2025, l’employeur devra reprendre en charge les frais de transport public selon le taux légal obligatoire de 50 %. Ce retour au taux standard vise à rééquilibrer les contributions sociales et à assurer une répartition plus équitable des charges entre employeurs et salariés.
Aides publiques et financements : Fin de certains crédits d’impôt
C’était très attendu et c’est fait :
La fin du crédit d’impôt innovation (CII)
Le crédit d’impôt innovation (CII), qui a longtemps soutenu les PME dans leurs projets innovants, ne sera pas prolongé au-delà du 31 décembre 2024, faute d’une disposition budgétaire le confirmant pour 2025. Néanmoins, le Gouvernement envisage de reconduire cette dépense fiscale dès le 1ᵉʳ janvier, mais avec un taux d’aide réduit, passant de 30 % à 20 %. Ce changement a pour but de contenir le coût fiscal tout en maintenant un soutien à l’innovation, essentiel à la compétitivité des PME.
La fin du crédit d’impôt pour la formation des dirigeants
Instauré en 2006, le crédit d’impôt pour la formation des dirigeants offrait aux entreprises un avantage fiscal lorsqu’elles investissaient dans le perfectionnement et la formation de leurs cadres dirigeants. Or, cette mesure prendra fin le 31 décembre 2024 en l’absence de reconduction explicitement prévue dans la loi de finances. La disparition de ce dispositif pourrait inciter les entreprises à repenser leurs stratégies de formation et d’investissement dans le capital humain, dans un contexte où le développement des compétences demeure un enjeu stratégique majeur. orientations budgétaires futures.